Pourquoi vous ne devez pas escalader Uluru/Ayers Rock ?

Uluru, rocher sacré pour les Aborigènes Anangu, propriétaires des lieux depuis plus de 20 000 ans… Mais aussi et surtout attraction touristique exploitée éhontément par le gouvernement australien, qui encourage « The Climb » malgré les protestations des Anangu… Ici, nous expliquons pourquoi vous ne devez pas escalader Uluru/Ayers Rock et pourquoi Uluru est-il si sacré et important pour les Aborigènes du Red Center !

[Article mis à jour le 4 avril 2020]

Introduction…

Dans cet article, nous avons essayé de comprendre pourquoi la plupart des touristes se rendant en Australie veulent absolument tenter « The Climb », l’ascension d’Uluru, dans le Northern Territory. Ceci, malgré les protestations des communautés Aborigènes de la région, propriétaires des lieux depuis 20 000 ans, qui considèrent cette grimpe comme une profanation et un véritable affront à leur culture ! Nous essaierons également de comprendre quel rôle joue le gouvernement australien dans cette histoire malheureuse de spoliation, en encourageant l’escalade irrespectueuse d’Uluru/Ayers Rock en feignant l’indifférence…

Sur la route menant au fameux Uluru/Ayers Rock, dans le parc d’Uluru/Kata Tjuta

Si comme nous, vous débarquez à Uluru depuis Sydney par les airs, vous passerez sans aucun doute par le minuscule terminal de l’aéroport d’Ayers Rock, à Yulara. Là, vous tomberez nez-à-nez avec un film promotionnel montrant Reggie Uluru, un vieil Aborigène Anangu, parlant de sa terre, de sa connexion spirituelle avec elle et du caractère tout à fait sacré que revêt Uluru pour les peuples autochtones de la région…

Bienvenue sur la terre des Anangu. Les Anangu vous invitent à en apprendre plus sur leur pays, la culture et à regarder ces terres au travers des yeux d’un Anangu. Les Anangu sont les propriétaires traditionnels d’Uluru, de Kata Tjuta et des territoires alentours qui vous attendent… Pendant des dizaines de milliers d’années, les Anangu ont pris soin de ces terres. Cette région a toujours été un endroit sacré ! Cette terre appartient aux Anangu et les Anangu sont connectés à cette terre au travers du Tjukurpa (loi traditionnelle)… Mon nom est Reggie Uluru et je vous souhaite la bienvenue en territoire Anangu.

Citation de Reggie Uluru, un Aborigène du peuple Anangu


Pourquoi Uluru/Ayers Rock est-il si important et sacré pour les Aborigènes Anangu ?

Dans la culture des peuples Aborigènes d’Australie, le Temps du Rêve (Dream Time) correspond à l’époque où les ancêtres des Premiers Hommes arpentèrent la planète pour y dessiner les reliefs, les cours d’eau, les rochers et toutes les choses qui nous entourent aujourd’hui. Dans la culture Anangu, spécifique du centre de l’Australie, ce concept de Temps du Rêve est appelé Tjukurpa, en langage Pitjantjatjara. D’après le Tjukurpa, le monolithe d’Uluru ainsi que les formations de Kata Tjuta sont justement l’une des nombreuses traces laissées par les ancêtres des Premiers Hommes. Il s’agit donc de reliques « vivantes » qui revêtent un caractère particulièrement sacré pour ces peuples.

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Ces traces constituent ainsi le patrimoine culturel et spirituel des Aborigènes, chaque individu Anangu descendant d’un ancêtre et possédant une connexion spirituelle avec certains sites particuliers… Les Aborigènes Anangu considèrent ainsi que les esprits de leurs ancêtres sont toujours présents dans les lieux qu’ils ont formé, comme Uluru ! Enfin il faut savoir que le Tjukurpa encadre plus largement la mythologie, l’Histoire de ce peuple, mais aussi les lois traditionnelles régissant la Société Anangu. Ainsi, les traces et les entailles que l’on retrouve dans la roche d’Uluru au niveau du Mutitjulu Waterhole seraient les vestiges d’un combat légendaire… Un terrible combat qui eut lieu durant le Dreamtime, entre Kuniya (la femelle python des rochers) et Liru (un serpent venimeux), marquant la fin du Temps du Rêve et le commencement de l’âge des Hommes !


Dépossession des terres & tourisme de masse : l’invention d’Ayers Rock !

Dès les prémices de la colonisation européenne en terre aborigène, les relations entre Australiens blancs et nomades Aborigènes sont tout à fait désastreuses… Effectivement, l’élevage pratiqué par les Blancs perturbe l’accès aux ressources naturelles (points d’eau notamment) ainsi que les cycles de chasse et de cueillette, dont sont dépendants les Anangu pour survire dans l’aridité du désert. Les Aborigènes n’ont d’autre choix que de tuer le bétail, et s’ensuivront des massacres d’Aborigènes Australiens par des fermiers Blancs en représailles… Une réserve de 73 000 km² est ainsi créée sur le site d’Uluru en 1921 pour y confiner et « protéger » les survivants des massacres…

Sur la route menant aux formations rocheuses de Kata Tjuta

Mais, en 1958, le gouvernement fédéral australien décide d’exclure les montagnes de la réserve – Uluru et Kata Tjuta – pour ouvrir ces deux sites au tourisme. Sans tenir compte évidemment du caractère particulièrement sacré que représentent ces « montagnes » pour les peuples Pitjantjatjara et Yankunitjatjara… À ce moment-là, l’Australian National Travel Association souhaite encourager les Australiens Blancs à voyager dans « leur propre » pays. Uluru/Ayers Rock est ainsi parfait pour monter une campagne marketing ! Cet énorme monolithe rouge se tenant au centre du désert représente alors un lieu de pèlerinage patriotique pour les Australiens Blancs des deux côtes ! De nos jours, plus de 400 000 touristes entreprennent le long voyage pour se rendre chaque année dans le Red Center afin d’admirer le célèbre rocher…


La gestion et l’exploitation touristique d’Uluru, une situation compliquée…

Il faut alors attendre de longues années de protestation pour que le gouvernement australien décide enfin de rendre leurs terres ancestrales aux Anangu le 26 octobre 1985. Mais comme bien souvent dans les cas de spoliation, cette concession ne s’est pas faite sans contrepartie… En échange du retour des terres qui leur revenaient de droit, les Anangu durent accepter de céder un bail de location au gouvernement australien pour 50, puis finalement 99 ans, en transformant la région d’Uluru en parc national. On assiste alors à la naissance du parc national d’Uluru – Kata Tjuta.

Coucher de soleil sur Uluru

À l’origine, l’accord stipulait que le parc devait être géré à la fois par l’Australian National Parks & Wildlife Service et par les Aborigènes Anangu, avec un poids majoritaire des Anangu dans les décisions et la gestion du parc… Mais la concession des terres se fera au prix d’un véritable SACRILÈGE pour les communautés Aborigènes de la région ! En effet, les Anangu ont pu récupérer leurs terres ancestrales à la seule condition que les touristes puissent entreprendre l’ascension et grimper au sommet d’Uluru… Or, cette ascension (Uluru Climb) est devenue une attraction touristique généreusement alimentée par l’office de tourisme australien à grand renfort de marketing alors qu’elle constitue une véritable profanation pour les peuples Pitjantjatjara et Yankunitjatjara ! De fait, les Anangu eux-mêmes s’interdisent l’escalade du rocher, car ce sentier sacré aurait été emprunté par les Ancêtres des Premiers Hommes lors du Temps du Rêve, selon le Tjukurpa… Et légalement, les Anangu ne peuvent rien faire pour interdire l’ascension du rocher…


Pourquoi les touristes continuent d’escalader Uluru ?

L’industrie du tourisme australien a donc inventé un passe-temps national complètement irrespectueux de la culture aborigène ! Mais en plus de cela, on dénombre plus de 35 morts (principalement par crise cardiaque) parmi les idiots ayant tenté l’ascension depuis les années 1960 ! Années où les chaînes de sécurité servant à escalader Uluru furent installées sur l’inselberg. Le dernier en date : un touriste Japonais est mort en juillet 2018 pour tenter l’ascension ! Mais, malgré les protestations des propriétaires ancestraux des lieux, qu’est-ce qui fait que l’Uluru Climb est toujours populaire ?

Et bien, le marketing aussie s’avère diablement efficace ! Jusque récemment, on pouvait encore trouver des boutiques de souvenirs à Alice Springs vendant des T-shirts ventant fièrement que le propriétaire avait effectué l’ascension du rock ! Pour le backpacker moyen qui a lu les brochures de Tourism Australia encourageant l’Uluru Climb de façon explicite, l’escalade d’Uluru/Ayers Rock est un véritable but en soi. Et lorsqu’il décide d’effectuer un voyage très onéreux pour se rendre au milieu de nulle part et découvre finalement sur place que la pratique est mal vue, changer ses plans s’avère difficile… Énormément de visiteurs considèrent d’ailleurs que l’escalade d’Uluru/Ayers Rock fait partie des choses qu’il faut absolument faire quand on visite l’Australie…

Si l’escalade d’Uluru est restée aussi populaire, c’est parce que pendant longtemps, Tourism Australia a pensé que les gens ne visiteraient plus le parc d’Uluru – Kata Tjuta si les touristes n’avaient pas le droit d’escalader. Et, les chiffres confirmaient cette hypothèse : jusqu’en 1990, plus de 70% des visiteurs se rendant à Uluru entreprenaient l’ascension du rocher ! Mais après plusieurs campagnes marketing promouvant des activités (culturelles, sportives, etc.) autres que l’Uluru Climb, c’est finalement la situation inverse qui s’est produite ! En 2010, seulement 30% des visiteurs entreprenaient l’ascension et en 2017, ce nombre est tombé à 20% !

Malgré les informations et les messages sur les panneaux au pied du rocher, il y a encore de trop nombreux imbéciles qui veulent se mesurer au rock, histoire de se prouver à eux-mêmes qu’ils ont bien un asticot dans le pantalon, juste pour dire « je l’ai fait »… À l’image de cette Française venu effectuer un striptease au sommet d’Uluru en 2010, ou ce crétin de backpacker, Français lui aussi, venu jouer à la pétanque au sommet... Dans la même trempe que ces comportements honteux, on a recensé d’autres touristes urinant sur le rocher et contaminant de ce fait les sources d’eau au pied du rocher, indispensables à la biodiversité de ces mares. Ou d’autres laissant des tas de déchets pendant l’ascension, abîmant sérieusement l’état du rocher…


La fin de l’escalade d’Uluru/Ayers Rock le 26 octobre 2019 !

Finalement, ces comportements complètement stupides et puérils sont désormais interdits ! Il a enfin été décidé de fermer la voie jusqu’au sommet et d’interdire l’ascension d’Uluru à partir du 26 octobre 2019, soit 34 ans exactement après que les Anangu aient retrouvé leurs terres ancestrales 🙂 Au final, est-ce que ça vous plairait si des touristes venaient nus à l’église pendant la messe, ou que d’autres rentrent dans une mosquée sans se déchausser ? Réfléchissez-y avant d’entreprendre cette ascension ridicule !


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8 thoughts on “Pourquoi vous ne devez pas escalader Uluru/Ayers Rock ?

    • Serialtravelers says:

      Exactement ! Je serais curieux de voir à quel point les gens qui grimpent sur Uluru seraient stupéfaits et enragés à l’idée que quelqu’un aille uriner sur leurs églises et leurs cimetières… C’est quand même assez désespérant ces comportements…

    • Serialtravelers says:

      C’est exactement ça, l’être humain, voulant toujours plus défier la Nature pour se prouver qu’ils ont quelque chose dans le pantalon… Ca en devient désespérant ! En espérant que les gens tombent sur l’article et réfléchissent à deux fois avant d’y grimper

    • Serialtravelers says:

      Merci Momo, j’espère que les gens cherchant des infos tomberont dessus et comprendront qu’il ne faut pas grimper dessus, par simple respect 🙂

  1. ayokoencampingcar says:

    Bravo pour ce reportage. En le répétant encore et encore les gens finiront par comprendre qu’ils insultent les aborigènes . Heureusement le 26 Octobre 2019 n’est plus très loin.
    Amicalement

    • Serialtravelers says:

      Merci Claudine, en espérant que les gens tomberont sur notre article et comprendront à quel point ce caillou est important pour ses propriétaires… Et comme vous dites, il ne reste plus qu’un an avant l’interdiction totale 🙂

      Bises à vous 3

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